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CANNES 2022 Cannes Première

Critique : La nuit du 12

par 

- CANNES 2022 : Dominik Moll cisèle un Zodiac à la française, une investigation policière chorale très efficace et solidement interprétée où les psychologies réfléchissent une société effilochée

Critique : La nuit du 12
Bastien Bouillon et Bouli Lanners dans La nuit du 12

"Chaque année, la Police Judiciaire ouvre 800 enquêtes pour homicide. Certaines ne sont jamais résolues. Le film relate l’une d’entre elles." Le carton inaugural de La nuit du 12 [+lire aussi :
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, le nouveau film de Dominik Moll, dévoilé dans la section Cannes Première du 75e Festival de Cannes, annonce clairement la couleur : ce sont les mystères du chemin (et ses protagonistes) et non la destination qui comptent. Mais en matière de meurtre, on espère évidemment toujours trouver le coupable et de pistes en soupçons, d’interrogatoires en écoutes téléphoniques, d’hypothèses intellectuelles en souricières de vidéo-surveillance, c’est tout un écheveau qui se dessine, reflétant à l’arrière-plan une société humaine composite et gangrenée par la violence à l’encontre des femmes.

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Ce terreau crépusculaire, le cinéaste français, notoirement son aise dans les atmosphères troubles (de Harry, un ami qui vous veut du bien à Seules les bêtes [+lire aussi :
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) s’en empare avec une très grande rigueur (sur un scénario écrit avec Gilles Marchand d’après une idée originale de Pauline Guéna extraite de son roman 18.3. Une année à la PJ) pour un film choral alliant un réalisme quasi documentaire sur le travail méthodique et obsessionnel de l’investigation policière (qui dévoile une addition de solitudes au sein d’un collectif ritualisé très masculin) à un rythme presque de thriller, de rebondissement en rebondissement, tout en réussissant à donner une véritable épaisseur à chacun de très nombreux personnages secondaires.

"Cette nuit, une jeune femme a été tuée près d’ici. Nous avons des raisons de penser qu’il s’agit de votre fille". Pour Yohann (Bastien Bouillon), tout nouveau chef de groupe de la brigade criminelle de Grenoble, la découverte du cadavre d’une jeune fille immolée par le feu la nuit précédente dans une zone pavillonnaire déserte de Saint-Jean de Maurienne, au retour d’une soirée entre copines, signe le début d’une longue traque. D’un ex à un autre, car la victime "tombait facilement amoureuse" et "aimait bien les bad boys", l’équipe de policiers (incluant notamment un Bouli Lanners à fleur de peau car en pleine séparation conjugale) chargée de l’affaire sillonne la région et ses localités enserrées par d’oppressantes et majestueuses montagnes, et confronte des jeunes désinvoltes (un "sex friend" rigolard), hypocrites (un amateur de double vie), inconscients (un rappeur qui avait mis sur YouTube une chanson sur la disparue incluant les paroles "je vais la cramer" et qui prétend que "ce n’étaient que des mots"), marginaux, désaxés, voire déjà condamnés pour violence conjugale ("on baisait fort, elle aimait mon côté charnel"). Toute une galerie de portraits d’individus qui, d’un briquet reçue dans une lettre anonyme à des caméras cachées sur les lieux du crime et sur la tombe de la victime, rythment trois années d’une enquête aussi passionnante que désespérante.

Mis en scène dans un style épuré et tranchant, La nuit du 12 distille les effluves du sacerdoce de l’investigation dans le venin d’une société où le regard sur la vie privée peut fausser le jugement : "on dirait qu’on parle d’une pute. Avec qui elle a couché, avec qui elle n’a pas couché ? Elle s’est fait tuer juste parce que c’était une fille. Elle aimait plaire et tombait toujours amoureuse des mauvais types."

Produit par Haut et Court et coproduit par les Belges de Versus Productions, La nuit du 12 est vendu par Memento International.

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