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VENISE 2021 Semaine internationale de la critique

Critique : Un corps sous la lave

par 

- VENISE 2021 : Helena Girón e Samuel M. Delgado livrent une critique politique courageuse et parfois âpre contre la version officielle de l’Histoire dans un film d’aventures ancestrales organique

Critique : Un corps sous la lave
Xoán Reices, Valentín Estévez et David Pantaleón dans Un corps sous la lave

Quelqu’un saute dans l'eau : un, deux... et on arrive à trois mystérieuses formes humaines. Une grande toile les enveloppe, les attrape dans ses plis et gêne leurs manoeuvres pour nager : ils luttent pour survivre, pour fuir, sans lâcher cette énorme voile de bateau qu'ils tirent avec eux, comme un trésor précieux. Ainsi, c'est en pleine action (confuse, rapide, très belle) que commence Un corps sous la lave [+lire aussi :
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fiche film
]
(Eles transportan a morte), le premier long-métrage d'Helena Girón, originaire de Compostelle, et du Canarien M. Delgado, auteurs avant ce film de nombreuses performances, installations artistiques et courts-métrages (Irmandade, Plus Ultra, Montañas ardientes que vomitan fuego et Sin Dios ni Santa María). Le film, tourné en galicien, a été présenté à la 36e Semaine internationale de la critique de la Mostra de Venise et va rallier ensuite la section Zabaltegi-Tabakalera du 69e Festival de San Sebastian.

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La trame de ce film parcourt une année qui a changé le cours de l’Histoire : 1492, date de la découverte de l’Amérique. Lors de cette expédition vers ce qui était alors inconnu, des hommes (pas précisément des saints, car on a recruté pour ce voyage incertain vers les confins du monde des détenus, incarnés par Xoán Reices, Valentín Estévez et David Pantaleón) sautent dans la mer, aux Canaries, depuis les caravelles menées par Christophe Colomb, en emmenant avec eux une voile de bateau. Bien sûr, ils seront poursuivis par ceux qui étaient jusque-là leurs compagnons, pour récupérer cette énorme pièce de tissu, nécessaire pour sillonner l’océan et accomplir la prouesse. Ailleurs, loin de là, en Galice, une femme (Sara Ferro) cherche désespérément de l’aide pour soigner sa sœur agonisante, qui a sauté elle aussi (dans le vide), pour fuir, aussi, mais sous le coup de l'angoisse. Tous ces gens sont près de la mort : ils l'esquivent et en même temps, inévitablement, ils la portent avec eux.

À partir de ces personnages, dans des décors naturels aussi beaux qu’agressifs (filmés à Orense et Tenerife), les réalisateurs bâtissent un film politique doublé d'un film d’aventures en pleine nature qui interroge la dimension soi-disant épique d'un moment décisif pour l’humanité, moment qui a été utilisé pour perpétuer des mythes culturels à l'éthique et l'honnêteté discutables qui se maintiennent aujourd'hui. Parce qu'il se peut que certains événements n'aient pas été aussi glorieux qu'on nous l'a raconté…

Pour accompagner ce questionnement, parmi les sensations que transmet le film figurent l’accablement, l’anxiété et l’énergie de ces rebelles qui se dissocient de (et boycottent) ce qui est accepté socialement. Par ailleurs, au fil du récit, les réalisateurs font usage d'images d’archives ainsi que d'images du film Dawn of America de Juan de Orduña (1951), une superproduction franquiste qui exaltait la figure du découvreur, pour construire un univers inquiétant, tendu et par moment sauvage qui place ce film puissant sur un territoire aussi risqué, ténébreux, inconfortable et âpre qu'intéressant, un territoire où tout le monde ne sera pas disposé à s’enfoncer.

Un corps sous la lave est une production des sociétés espagnoles Filmika Galaika et El Viaje Films, en association avec La Banda Negra (Espagne) et Blond Indian Films (Colombie). Les ventes internationales du film sont gérées par Bendita Film Sales. En Espagne, il sortira dans les salles avec Begin Again.

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(Traduit de l'espagnol)

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