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SHEFFIELD DOC FEST 2020

Critique : Our Land, Our Altar

par 

- Ce premier long-métrage du Portugais André Guiomar se penche sur les histoires humaines qui se perdent quand des termes comme "gentrification" sont normalisés

Critique : Our Land, Our Altar

Our Land, Our Altar, le premier long-métrage d'André Guiomar, présenté dans la section Rebellions de Sheffield Doc/Fest, est un documentaire sur les habitants de la cité d'Aleixo, un quartier pauvre de Porto. C’est un film qui se divise en deux moitiés : la première se passe en 2013, c’est-à-dire deux ans après l'annonce que le bâtiment serait abattu, alors que les résidents attendent encore leur avis d’éviction. La deuxième moitié se passe six ans après, et c’est à ce saut entre ces deux périodes dans le temps que le film doit sa puissance.

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La malchance de ces gens, c'est que leur cité a été érigée sur une belle colline avec vue sur le fleuve. Quiconque a observé n’importe quelle ville célèbre d’Europe ces vingt dernières années ne sera pas surpris que les promoteurs et les politiciens veuillent déplacer leurs communautés et travailleurs les plus pauvres pour remplacer leurs logements par des appartements pour la classe moyenne. Oh non, pas encore un documentaire sur la gentrification, dit la brigade des blancs bien blancs en repartant à bicyclette. Et pourtant, Our Land, Our Altarvaut la peine qu’ils serrent les freins, car ce film parvient à retransmettre le stoïcisme d’une communauté à qui on dit qu’ils vont devoir bouger, les dommages psychologiques que subissent des gens qui ne savent pas où ils seront transférés – comme un résident le dit à sa fille, il n’y a aucune manière de savoir si ça sera mieux, même si les tours d’appartements sont en meilleur état. Elle décrit comment quelqu’un s'est suicidé après avoir été forcé de quitter sa maison – est-ce juste une coïncidence ou, comme elle le soupçonne, le résultat des dommages psychologiques qui procèdent du fait de n’avoir aucune sécurité et aucun contrôle sur sa vie ?

C’est probablement le seul commentaire clair et direct dans tout le film car Guiomar, qui maintient sa caméra à une distance respectueuse, préfère observer les habitants des différents logements, par exemple quand ils dînent. En restant largement hors-champ pour adopter la position d'un tiers, le réalisateur veut observer le quotidien. C’est un endroit plein de cordes à linge, d'escaliers hitchcockiens et de vie domestique. Ce n’est peut-être pas le bonheur, mais pour ces gens, c’est chez eux. Ils ne doivent pas partir parce qu’il y a des problèmes avec les bâtiments, mais pour le gain financier d'autres.

Guiomar nous montre l’humanité de ceux qui vivent dans un soi-disant appart à consommateurs de crack. La chanson qui contient le titre du film parle d’Aleixo et décrit un endroit qu’on veut éviter, mais où la réalité est différente. Le réalisateur se garde de romanticiser leurs vies, car son objectif reste de démontrer combien la vie des gens défavorisés est dure. Au lieu de les aider, la ville veut les condamner.

Le saut de six ans en avant donne au film un côté assez poignant. Le bâtiment a effectivement été détruit, huit ans après la première annonce de son sort et les derniers résidents sont en train de partir, prenant avec eux tout ce qu’ils pourront vendre. C’est une situation bien plus sombre que celle de Dona Clara, la dame jouée par Sônia Braga qui écoutait des vinyles dans Aquarius [+lire aussi :
critique
bande-annonce
fiche film
]
. Il y a une scène incroyable où un enfant regarde un bloc d’immeuble du complexe se faire dynamiter et s'évanouir d’un coup à la télévision, comme si c’était un film d’action, mais l’excitation de l’enfant disparaît vite quand la mère lui dit que leur logement sera le prochain. Ce n’est pas quelque chose qu’on a envie de fêter.

Our Land, Our Altar a été produit par les sociétés portugaises Olhar de Ulisses and Cimbalino Filmes. La première s’occupe aussi de ses ventes internationales.

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(Traduit de l'anglais)

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