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IFFR 2020 Bright Future

Critique : Merry Christmas, Yiwu

par 

- Mladen Kovačević trace un portrait fascinant de la ville chinoise de Yiwu, qui produit plus de deux tiers des décorations de Noêl du monde

Critique : Merry Christmas, Yiwu

La ville de Yiwu, dans la province du Zhejiang, en Chine, abrite plus de 600 usines qui produisent plus des deux tiers des décorations de Noël vendues dans le monde. Elle est le sujet, ou plutôt le décor, du nouveau documentaire du Serbe Mladen Kovačević (4 Years in 10 Minutes [+lire aussi :
critique
bande-annonce
fiche film
]
). Merry Christmas, Yiwu [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Mladen Kovačević
fiche film
]
, qui vient de faire sa première mondiale dans la section Bright Future du Festival de Rotterdam, est un film à combustion lente qui observe la vie de tous les jours et le travail à Yiwu.

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Ce titre se divise en ce qu'on peut qualifier de chapitres, et chacune de ces six parties comprend de courts dialogues à deux locuteurs qui apparaissent, inscrits à l’écran, en chinois. Le film s’ouvre sur l’image de deux jeunes filles qui peignent à la main des décorations gris argent, après quoi la caméra se déplace vers un homme qui travaille sur une machine qui débite des tas de boules en aluminium coloré.

Dans une autre scène, le propriétaire et gérant d’une des usines évoque l'énorme volume des commandes et concède que les travailleurs vont sentir beaucoup de pression. "Ils doivent travailler beaucoup, mais pas aux dépens de leur santé", assure-t-il, une observation qui suggère un contraste frappant entre son usine et les ateliers textiles tenus sur place par les entreprises occidentales – quoique les travailleurs de Yiwu sont en réalité soumis à des conditions de travail difficiles : ils commencent à envoyer les commandes en octobre, de sorte que l’été est l’époque la plus chargée de l’année, au moment où la température dépasse souvent les 40°.

Dans d’autres chapitres, Kovačević nous fait entendre des conversations autour d’un dîner de famille, ou encore une conversation téléphonique entre deux amies où l’une d’elle dit qu'elle a rompu avec son petit ami. Dans la scène suivante, un jeune homme explique qu’il vient de quitter sa petite amie pour une collègue de travail. Le montage (impeccable) de Jelena Maksimović nous amène à conclure qu'il s’agit de la même relation, mais comme Kovačević ne met jamais ces anciens amants potentiels dans le même plan et ne se sert pas d’inscriptions à l’écran pour nous dire leurs noms et nous décrire leurs rôles, ils pourraient aussi être deux personnes sans aucun lien.

On ne se poserait pas vraiment ce genre de question si Merry Christmas, Yiwu était un documentaire à la narration conventionnelle, mais le rythme, lent mais ferme, du film et son approche distanciée suggèrent que ces histoires ne sont pas là parce qu'il est important ici de montrer des faits concrets sur les personnages. Elles ne sont en fait que des exemples d’une certain manière de vivre dont l’objectif est de nous montrer une vue d’ensemble de la situation, plutôt que de se concentrer sur des éléments individuels.

Cette approche est appuyée par l’absence de musique accompagnant les images – on n'entend de la musique que dans deux séquences descriptives qui servent plusieurs objectifs et contiennent des chansons diégétiques. Dans la première, la femme d’un gérant ou propriétaire d'usine danse sur une vidéo de propagande célébrant la Chine qui joue depuis son téléphone portable. Dans l'autre, très belle, située vers la fin du film, où l'on assiste à une danse traditionnelle avec masque de dragon, Kovačević se rapproche autant de la poésie qu'on peut le faire dans un documentaire.

Pour un spectateur cherchant à confirmer ou remettre en cause l'idée qu'il se fait de la Chine (ou des usines qui produisent les décorations de Noël), Merry Christmas, Yiwu sera une déception, bien qu'on puisse déduire certaines choses à partir des dialogues et des décors, et même y voir un tableau d'ensemble de la culture locale. En revanche, pour ceux qui cherchent à faire un parcours cinématographique subtil et inattendu, parcours qui peut parfois être un peu frustrant par sa dramatisation réduite au minimum, son rythme constant et sa photographie grand angle et très propre (par Marko Milovanović), il y a beaucoup à vivre en voyant ce film.

Merry Christmas, Yiwu a été coproduit par Horopter Film Production (Serbie), Sisyfos Film Production (Suède), Bocalupo Films (France), ma.ja.de Filmproduktions (Allemagne) et Visible Film (Belgique). Les ventes internationales du film sont assurées par Deckert Distribution (Leipzig).

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(Traduit de l'anglais)

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