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KARLOVY VARY 2022 Compétition

Beata Parkanová • Réalisatrice de The Word

“Nous oublions souvent ce que nous avons pensé, mais pas ce que nous avons ressenti”

par 

- La réalisatrice tchèque, dont le film a gagné deux prix à Karlovy Vary, remonte le temps et s’inspire de l’histoire de sa propre famille

Beata Parkanová • Réalisatrice de The Word

Pour faire le tendre drame The Word [+lire aussi :
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, Beata Parkanová s'est inspirée de sa propre famille, mais l'histoire du film – celle d'un notaire de province qui se fait déchiqueter par la politique impitoyable de l’été 1968 – s'est avérée étonnamment universelle, et s'est attiré beaucoup d’attention au Festival de Karlovy Vary, où il a remporté le prix de la mise en scène et un autre prix pour l'interprétation de Martin Finger (lire l'article).

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Cineuropa : Vous avez dit que vous pensiez à votre famille en racontant cette histoire. N'était-ce pas le corpus auquel vous pensiez vous limiter, ou est-ce que vous saviez dès le départ que vous iriez au-delà de ça ?
Beata Parkanová :
J’ai puisé dans ma famille ce dont j’avais besoin ; ensuite c’est l’univers décrit ou l’énergie de l’intrigue elle-même qui m’a amenée plus loin. Heureusement, bien que ma relation avec ma famille soit compliquée à bien des égards, quand il s’agit de mon travail, ils sont tous très généreux, et je peux travailler à partir de leurs histoires aussi librement que je le souhaite. Dans mon premier long-métrage, Moments [+lire aussi :
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[également projeté à Karlovy Vary], j'utilisais déjà des situations où ils ont pu retrouver des petits bouts d'eux-mêmes, mais ils l'ont tous accepté avec humour et aucun ne s'en est plaint. Quand à mon grand-père et ma grand-mère, qui ont inspiré The Word, ce sont les gens les plus gentils et les plus généreux que je connaisse, donc s'inspirer de leurs histoires en écrivant ne m’a posé aucun problème. Après tout, ce que je fais comme réalisatrice n’est pas un tableau de ma famille : c’est un film de fiction.

C’est super que vous ne repreniez pas une fois de plus le motif de la "femme qui subit". Le film parle vraiment du couple, de tous les deux à parts égales. Comment voyiez-vous cette dynamique ?
Je voulais écrire une histoire sur deux personnages aussi forts l’un que l’autre, parce que je pense que c’est de là que naît le drame. J’ai eu la chance d’être témoin de la relation entre ma grand-mère et mon grand-père, qui étaient des partenaires comme les personnages du film. Ils n'étaient pas amis, ils n’étaient pas tolérants, ils ne savaient pas nécessairement toujours comment s’entendre, mais comme partenaires, ils étaient sur un pied d'égalité, et je pense que c’est ce qui a fait que leur relation a tenu et qu'elle est restée vraie et intense toute leur vie.

Leur mariage n’était pas mort ; ils s'aimaient vraiment beaucoup. C’est pour cela qu’une histoire inspirée de leur vie ne pourrait jamais, selon moi, répondre au modèle "homme fort, femme soumise". J’aime le fait que dans mon film, on peut continuer de découvrir tout du long les dynamiques très vivantes de la relation entre les personnages principaux et observer la manière dont leurs rôles évoluent. On peut voir lequel est plus fort, et quand, et lequel faiblit par moments.

Vous semblez très intéressée par le dilemme "conserver ses principes / tout faire pour survivre". Pourquoi avez-vous décidé de parler de cette période de l'Histoire, où les gens devaient faire ce genre de choix quasi quotidiennement ?
Dans le monde d'aujourd’hui, je trouve difficile de voir clairement quelles sont les raisons ou conditions principales les plus substantielles qui finissent par nous pousser à prendre les décisions qu'on prend. Nous trouvons tous, et ce quotidiennement, mille excuses pour justifier qu'on ne vit pas la vie qu’on devrait ou qu'on voudrait vivre, et souvent, une situation extérieure extrême est la seule occasion qu'on ait de nous confronter à ces excuses, et de prendre clairement parti. L’année 1968 m'offrait la situation extérieure extrême dont j'avais besoin pour mon histoire.

Pourquoi choisissez-vous parfois de geler l’écran, pour capturer un moment ? Est-ce que c'est un renvoi aux vieilles photographies ?
C’est parce que les expériences les plus intenses de nos vies sont gravées en nous, d’une certaine manière, et bien qu’on n’y pense pas tous les jours, elles restent avec nous comme des sortes d’images, ou de photographies, qui peuvent ensuite reprendre vie, même des années après. On oublie souvent ce qu'on a pensé, mais jamais ce qu'on a ressenti.

Quelle est votre lecture de ce qui arrive à Václav ici ? Est-ce qu’il abandonne, ou est-ce que c’est sa manière de se battre ? C’était intéressant de sentir cette pression typique des petites villes, les sourires qui accompagnent les injonctions.
Il était important pour moi de montrer que les questions auxquelles réfléchit Václav en privé, dans son espace personnel, l'affecte aussi de manière quotidienne dans son travail. La pression qu’il ressent est double : d’un côté, il y a toutes ces injonctions politiques, de l’autre, le fait qu'il doit continuer de défendre les principes qu’il représente et qu'il présente à ses clients.

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(Traduit de l'anglais)

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