email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

BERLINALE 2021 Compétition

Daniel Brühl • Réalisateur de Next Door

“Les gens célèbres disent toujours combien c’est affreux d’être reconnus et abordés où qu’ils aillent, mais il y a pire : ne pas l'être”

par 

- BERLINALE 2021 : Dans son premier film en tant que réalisateur, qu’il interprète aussi, aux côtés de Peter Kurth, l’acteur allemand/espagnol prend enfin sa revanche

Daniel Brühl  • Réalisateur de Next Door
(© Pascal Buenning)

Tandis qu'il se prépare pour une importante audition, Daniel (Daniel Brühl), un acteur célèbre, s'arrête dans un bar miteux avant de rallier l’aéroport. Là, il tombe sur Bruno (Peter Kurth), l’homme qui le déteste le plus, et ce activement, depuis des années. Ce premier long-métrage en tant que réalisateur de Brühl, Next Door [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Daniel Brühl
fiche film
]
, est présenté dans le cadre de la Berlinale 2021.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Cineuropa : L'idée de jouer quelqu’un qui pourrait être vous, ou du moins la pire version de vous, devait être séduisante. L’auto-satisfaction de ce type est vraiment très drôle.
Daniel Brühl :
Je me suis senti lavé, purifié, après avoir fait ce film. Il m'a permis de me venger de toutes les choses que j’ai pu entendre dans ma vie. C’est le prix qu’on paie en tant qu’acteur, et je l'ai fait avec joie – je continue de penser que c’est un métier merveilleux. Cependant, ces deux dernières années, les gens ont rompu la distance qui existait jusque-là. Ils vous observent, vous jugent et interrompent vos conversations. Certains se sentent ce besoin désespéré de vous dire à quel point ils vous trouvent horrible ! C’était une manière de gérer cela, et de casser mon image. Depuis Good Bye, Lenin! [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Wolfgang Becker
fiche film
]
, beaucoup de gens pensent que je suis le type le plus gentil du monde, le genre qui aide les vieilles personnes à traverser la rue.

Un des thèmes qui m'intéressaient, c'était la gentrification. Je me suis toujours senti comme un envahisseur, à Berlin comme à Barcelone, qui est ma deuxième maison, donc j'ai essayé de m’adapter. Une fois, j’étais au restaurant là-bas, à parler de football avec les serveurs et à essayer d'user de mon catalan rouillé pour montrer à tout le monde que j’étais l'un d'eux. Et puis j’ai vu ce type, un ouvrier en bâtiment, qui me regardait fixement. Je voyais bien qu’il me détestait, avec ma petite valise, à causer "Barça, Barça !". Je l’ai imaginé sur des échafaudages, travaillant sur la façade de ma maison, observant mon appartement jusqu'à commencer ce duel un jour. J'écris très mal, alors j'ai contacté [le scénariste] Daniel Kehlmann, qui est moitié autrichien, ce qui veut dire qu’il est plus drôle que les Allemands. Je lui racontais toutes ces expériences pour nourrir le scénario mais croyez-moi, il y a de nombreux éléments fictionnels dedans. J’espère que les gens le savent ! J’ai fait de ce type un trou du cul vaniteux, ce qui n’est qu’en partie un problème que j'ai moi.

Diriez-vous que maintenant, les stars ont ce besoin de prouver qu’ils sont "comme tout le monde" ? Même Kevin Hart s'est plaint récemment du fait qu'être célèbre est devenu nul ces temps-ci.
Mes collègues et amis me demandent pourquoi je passe autant de temps à parler aux gens qui viennent vers moi. J’ai toujours eu la conviction qu'au bout du compte, c'est pour eux que je fais ce métier. Je n’ai jamais rencontré de Bruno, mais il y a d’autres types de gens, par exemple le gars qui ne veut plus vous lâcher même si on est au téléphone. Ceci étant dit, j'ai entendu cette phrase marrante il y a des années, dans la bouche d’une star qui disait que les gens célèbres disent toujours combien c’est affreux d’être reconnus et abordés où qu’ils aillent, mais qu'il y a pire : ne pas l'être. Pour quelqu’un comme Daniel, c'est lié à la vanité. Quand il prend une photo avec deux jeunes femmes, c'est aussi pour se la jouer devant Bruno. Mais au final, ça peut être porteur de joie, et je ne crois pas une seule seconde les acteurs qui disent "Oh mon dieu, je ne veux pas qu'on me reconnaisse" et puis qui s'habillent comme des idiots, avec une grande casquette de baseball et des lunettes de soleil, dans une intention qui est totalement à l'opposé de ça [rires].

Des types comme Bruno, on en a déjà vu mille fois. Dans des pays comme les nôtres, je suppose qu’il y a beaucoup de gens qui se sentent laissés pour compte ?
C’est vrai, c’était le problème dans la première version du scénario : nos deux personnages n’étaient pas encore assez développés. J’avais peur (comme c’est mon film, et que je raconte cette histoire selon ma perspective) de finir par décrire un Est-Allemand comme un gars doté d'un esprit d'agent de la Stasi ou de Méphistophélès. Il a ses raisons. Son existence a été jalonnée d'échecs et de déceptions, et de tragédies. J’ai été témoin de ça de nombreuses fois à Berlin, ou en allant à la campagne : il y a des gens qui se sentent trahis. Par le système, par le passé. Des gens qui n’ont pas trouvé leur place. Ça explique certains des gros conflits qui existent encore entre l'Est et l’Ouest, dans la mesure où l’Ouest avait tendance à écrabouiller l'Est à l’époque : ce n’était pas sain. Là où je vis, aujourd'hui, parfois je croise des voisins et les différences entre nous sautent aux yeux. Je pense malgré tout qu’ils m’aiment bien, à moins qu'ils ne fassent juste semblant.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'anglais)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Lire aussi

Privacy Policy