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SARAJEVO 2020 Compétition

Ruxandra Ghiţescu • Réalisatrice d'Otto the Barbarian

“Toute réalité un tant soit peu imparfaite tend à être marginalisée ou occultée”

par 

- La réalisatrice roumaine Ruxandra Ghiţescu nous parle de son film Otto the Barbarian, sur un punk de 17 ans dont la petite amie vient de se suicider

Ruxandra Ghiţescu • Réalisatrice d'Otto the Barbarian
(© Norbert Fodor)

Les films sur les adolescents sont plutôt rares dans le cinéma roumain, où l'on préfère les personnages matures. Désormais, la question de la représentation est moins problématique grâce au premier film de Ruxandra Ghiţescu, Otto the Barbarian [+lire aussi :
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, qui aborde les thèmes du suicide et de la maladie mentale avec audace. Voici ce que la réalisatrice nous a confié sur les difficultés rencontrées en faisant ce film.

Cineuropa : Les deux films roumains récents les plus intéressants sur les adolescents ont des personnages principaux du sexe opposé à celui du/de la réalisateur/trice et scénariste. Radu Muntean a réalisé et co-écrit Alice T. [+lire aussi :
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, et vous avez réalisé et écrit Otto. Quels challenges l'entreprise a-t-elle représenté pour vous ?
Ruxandra Ghiţescu :
Merci pour cette comparaison, que je trouve franchement flatteuse. J'ai écrit le personnage d'Otto avec des pincettes, surtout qu'il s'appuie davantage sur l'observation et l'empathie que l'expérience directe, même si beaucoup de ses traits sont directement inspirés de moi. Ensemble avec Florentina Bratfanof, notre directrice de casting, j'ai cherché le bon acteur pendant longtemps, et j'ai essayé de tirer quelque chose de la performance de chaque Otto que j'ai rencontré. Marc Titieni est un acteur très généreux et nous étions en mesure de construire quelque chose ensemble. Les moments les plus délicats étaient ceux en rapport avec la sexualité et la violence. Pour ces situations précises, nous sommes allés encore plus loin, en dehors du champ du comportement habituel de Marc et de ce que nous prévoyions de faire faire à son personnage. Le personnage de Laura aussi était compliqué, car il n'est pas facile du tout d'imaginer une fille de 16 ans, surtout dans ce genre de contexte rude. Ioana Bugarin et Teona Galgoţiu ont collaboré étroitement avec moi pour créer Laura.

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Une partie importante de l'histoire est la relation entre Otto et Costin, l'employé des services sociaux qui enquête sur la mort de Laura. Comment avez-vous préparé l'écriture du personnage de Costin ?
Je pense que Costin est le personnage du film pour lequel on s'est le plus documenté. Cette figure légèrement méphistophélique est née de faits qu'on m'a racontés : à la fin de leur rencontre, un psychologue chargé d'une affaire sociale similaire conseille à l'enfant d'aller voir Andrei Rublev. J'ai réellement ressenti de l'empathie envers Costin et je pense que c'est très évident dans le film. Au moment où j'ai composé le personnage de Costin, j'ai reçu l'aide de plusieurs spécialistes qui ont travaillé pour les services sociaux. Ils m'ont orientée vers des livres sur le sujet et j'ai pu analyser, dans la limite de mes compétences, plusieurs études de cas.

Votre film met en avant des problèmes qui pourraient avoir une profonde résonance auprès d'un public d'adolescents. Pensez-vous que le film pourrait être projeté et discuté dans les lycées ?
J'espère vraiment que cela va pouvoir être le cas. Ces derniers temps, je me suis souvent retrouvée dans des contextes qui m'ont amenée à songer aux adolescents. Pour moi, Otto est un film nécessaire qui parle, qui plus est avec empathie, du manque de communication, mais aussi de la peur de la maladie mentale. Nous sommes entourés de tellement de récits heureux fictifs, expurgés pour sembler vrais, à tel point que toute réalité un tant soit peu imparfaite tend à être marginalisée et occultée.

En tant que réalisatrice qui a investi des années dans un film, qu'est-ce que cela fait de découvrir quelques jours avant sa première mondiale qu'il n'aura pas droit à une projection au cinéma, devant un public ?
Je ne sais pas trop comment décrire ce que je ressens. Je n'ai jamais vécu une première de film en tant que réalisatrice, donc la seule chose que je perds, c'est l'idée que je m'en étais faite. J'ai vraiment souhaité et espéré que le Festival de Sarajevo aurait des projections physiques, et ça a été l'intention des organisateurs jusqu'au dernier moment. Évidemment, je voulais partager l'émotion de la projection avec l'équipe ainsi que le public, mais les choses sont ce qu'elles sont. Je dois dire que l'équipe de Sarajevo se bat pour offrir une expérience cinématographique complète, et globalement ils y arrivent. Je me sens impliquée et j'espère recevoir des retours de ceux et celles qui ont ou qui vont regarder mon film.

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(Traduit de l'anglais par Chloé Matz)

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