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NIFFF 2020

Anaïs Emery • Co-fondatrice et directrice artistique, NIFFF

“On parle toujours de la magie du cinéma, mais il est capital de montrer comment on la crée”

par 

- Nous avons discuté avec Anaïs Emery, la directrice artistique du Festival international du film fantastique de Neuchâtel, alors qu’elle était en train de boucler sa dernière édition aux commandes

Anaïs Emery  • Co-fondatrice et directrice artistique, NIFFF
(© Miguel Bueno)

Récemment nommée directrice générale et artistique du Festival de Genève, Anaïs Emery, la co-fondatrice et directrice artistique du Festival du film fantastique de Neuchâtel (NIFFF), est actuellement en train de profiter de sa dernière édition de l'événement dédié au film de genre, cette année organisé en ligne, mais il est toujours prévu d'en célébrer le 20e anniversaire l'année prochaine. Quoique... ce n'est peut-être pas sa dernière édition. "Je reviendrai, a-t-elle dit. En tant que spectatrice !"

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Cineuropa : En regardant les premiers chiffres, il semblerait que votre public ait bien accueilli l'idée d'un festival en ligne. C'est un format qui encourage les solutions nouvelles, j'ai adoré l'idée de faire parler Luca Guadagnino depuis sa voiture !
Anaïs Emery :
Notre objectif était d'organiser un festival en présentiel. Après un temps de réflexion pendant lequel nous avons aussi consulté nos collègues étrangers, nous avons décidé d'avoir lieu sous forme d'écosystème composé de NIFFF TV (en ligne tous les jours à 21 heures), de 20 films à la demande sur notre plateforme et d'une application servant d'outil de communication avec notre public.

Lorsque la pandémie a éclaté, l'organisation de notre 20e édition était déjà tellement avancée que nous avons utilisé ce réseau déjà existant pour rendre l'événement aussi intéressant que possible, en contactant Eli Roth, Nicolas Winding Refn, etc. C'était une bonne excuse pour interviewer un tas de personnes sur l'évolution du genre fantastique, ce qui est à mon sens un sujet fascinant, car il a vraiment beaucoup changé. Le cinéma de genre est en train de devenir plus facile à "gérer", pour ainsi dire ; il s'insère dans les blockbusters d'Hollywood et les films d'auteurs de prestige. Cela dit, certains réalisateurs sont encore méprisés. C'est bizarre, mais ces quelques dernières années ont été vraiment dynamiques.

Il y a quelques années, vous avez mentionné l'importance de défendre l'inclusion dans le cinéma de genre, en allant au-delà du "boys' club" – ce que vous avez également fait au festival. Pensez-vous que les choses ont changé ?
Toute l'industrie du cinéma est un "boys' club", et c'est déjà un problème. La communauté du film de genre a fait des efforts pour se décloisonner, et nous avions déjà de grands films dirigés par des femmes comme Julia Ducournau ou Jennifer Kent. Je pense qu'on avance dans la bonne direction, mais nous avons besoin de plus de respect et de flexibilité. Il suffit d'écouter notre interview avec Connie Nielsen, qui porte sur le mouvement #MeToo et les conditions de travail des jeunes actrices. Les femmes nécessitent plus de crédibilité et de sécurité dans leur carrière et dans l'industrie du film. Je perçois des changements, et j'en suis contente. Mais ce n'est pas encore ça.

Les grands anniversaires donnent une chance de regarder en arrière. Est-ce pareil pour vous ? Y a-t-il quelque chose que vous êtes particulièrement fière d'avoir accompli ? J’ai le souvenir de vous en train de raconter la fois où vous avez pleuré en rencontrant Ray Harryhausen.
Je suis fière, en tant que femme, d'être restée aussi longtemps pour voir le festival évoluer. Je suis heureuse de voir ce qu'il est devenu. J'ai évidemment des regrets ; je suis perfectionniste. Mais le NIFFF détient un concept qui le distingue : nous n'avions pas à prendre la place de quelqu'un d'autre ; nous avons trouvé notre propre chemin. Oui, rencontrer tous ces gens qui ont joué un rôle important dans la construction de ma personnalité a été merveilleux, mais le plus touchant a sans doute été de les présenter au public. Voir Harryhausen faire sa masterclasse, avec tous ces jeunes qui écoutaient, ça, ça a été grandiose. On parle toujours de la magie du cinéma, et il est important de maintenir la fascination pour les histoires, mais je pense sincèrement qu'il est aussi capital (et c'est le rôle d'un festival) de montrer comment cette magie est racontée et créée.

D'habitude, les festivals sont divisés en deux côtés : il y a un tapis rouge et une entrée à l'arrière, mais le NIFFF a la réputation de mettre tout le monde sur un pied d'égalité.
Il y a différentes raisons à cela. Nous sommes partis de peu : je pense qu'à notre première édition, il y avait 3000 personnes, et puis ça a évolué, mais nous avons toujours voulu avoir un festival sans tapis rouge et qui garde cette proximité intacte. Être en Suisse, dans une petite ville en plein été, a sûrement aidé aussi. J'espère que ces racines, cet accent sur la liberté et la proximité, vont rester protégées, pour ainsi dire. Beaucoup de gens ont déjà exprimé leur espoir que le festival reste subversif, car on peut et évoluer, et garder cette mentalité intacte. En être conscient est déjà un premier pas.

Comptez-vous toujours rester impliquée d'une certaine façon ? Sans parler d'amener cette "subversion" à Genève ?
Il me faudra couper tous les liens. Si j'étais professeure de yoga, je resterais en contact. Mais dans cette situation, c'est juste impossible. Il n'y a rien de bon dans cette crise sanitaire, mais elle m'a donnée l'opportunité de travailler différemment avec mon équipe. Nous avons eu une réunion ce matin et nous nous sommes dit : "Eh bien si nous devons le refaire, nous savons déjà comment nous y prendre". Donc dans ce sens, ça a été une bonne expérience, et je partirai en ayant cela à l'esprit.

Quant au prochain festival, il a déjà cette position subversive et innovante. Et c'est aussi une des raisons pour lesquelles je vais le rejoindre ! Je serai une nouvelle-venue, ça fait un grand changement en terme d'état d'esprit. Je vais donc apprendre des tas de choses nouvelles ; après je pourrai vous dire ce que j'yaurai apporté.

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(Traduit de l'anglais par Chloé Matz)

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