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HOT DOCS 2020

Stefanía Thors • Réalisatrice de The School of Housewives

"Nous ne nous donnons plus le temps de faire les choses"

par 

- Nous avons interviewé l'Islandaise Stefanía Thors sur son film The School of Housewives, l'institution qu'il évoque et les raisons pour lesquelles le sujet a piqué son intérêt

Stefanía Thors  • Réalisatrice de The School of Housewives

Dans son premier long-métrage documentaire, présenté en avant-première mondiale au Festival international canadien du documentaire Hot Docs, Stefanía Thors a finalement réussi à franchir les portes de The School of Housewives [+lire aussi :
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, fondée il y a longtemps, en 1942. L’époque a peut-être changé, mais certaines femmes veulent encore apprendre à raccommoder leurs vêtements ou à préparer des repas, surtout lorsque la durabilité préoccupe de plus en plus les gens.

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Cineuropa : L’une des anciennes élèves de l’établissement déclare : "Il n’y a aucune anecdote au sujet de The School of Housewives." Pourquoi avez-vous décidé de montrer cet endroit, bien que ce ne soit pas le Studio 54 ?
Stefanía Thors : J’ai vécu dans la même rue. J’étais curieuse de savoir ce qui se cachait dans ce bâtiment, je voulais voir ce que les gens faisaient dedans. Lorsque mon ami m’a parlé de l’école, mon approche de cette dernière a d’abord été très négative. De mon point de vue, ce n’était pas le bon moment d’avoir une école de ce genre à l’heure actuelle. Après tout, pourquoi les femmes ont-elles encore besoin d’apprendre à cuisiner et à faire le ménage ?! Cependant, mon ressenti a changé lorsque j’ai commencé à faire ce film.

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, avec Juliette Binoche, se déroule dans un établissement similaire, mais il se concentre davantage sur ses aspects oppressifs. De votre côté, vous démontrez que ces « corvées » peuvent également procurer de la satisfaction.
Je suis vraiment tombée sous le charme de cette école. Être simplement là-bas m’a donné l’impression de méditer, en quelque sorte : le temps s’est juste arrêté. Elle est située dans le centre de Reykjavik et c’est bruyant là-bas, à cause de la circulation et des passants. Mais une fois qu’on entre, c’est comme si on pénétrait dans une autre dimension. Il y a tellement de choses que ces élèves accomplissent au cours d’un semestre uniquement. À force, j’ai voulu m’y inscrire !

Avant, elle s’appelait L’école des femmes au foyer, mais dans les années 90, son nom a été modifié pour que cet établissement s’appelle "L’économie ménagère". J’ai rétabli son nom d’origine, notamment pour attirer l’attention des spectateurs : Home Economics School (L’école de l’économie ménagère, en français) n’aurait pas été le titre le plus accrocheur. Ces filles sont heureuses de vivre là-bas. Elles deviennent des amies très proches et continuent à entretenir cette amitié après leurs études. Selon moi, c’est tellement beau. Beaucoup viennent, car leurs mères ou grands-mères étaient dans cette école avant elles. Maintenant, elles veulent en faire également l’expérience.

Ses classes rappellent un certain mode de vie « rétro », qui tombe vraiment à point aujourd’hui (comme d’insister sur le fait de ne pas gaspiller de la nourriture).
Je n’avais pas conscience de cet aspect [écologique] jusqu’à ce que nous commencions à monter le film : au début, ce n’était pas du tout ce vers quoi nous nous dirigions. Rien n’a vraiment changé depuis l’ouverture de l’école, mises à part quelques modifications mineures : elles n’utilisent plus de mousse pour teindre leurs vêtements, par exemple. Elles effectuent simplement un retour aux sources, en apprenant à être autonomes. Elles apprennent aussi à ne pas gaspiller la nourriture ou à recoudre leurs vêtements au lieu de courir en acheter de nouveaux. Selon moi, cette école enseigne exactement ce que nous devrions tous savoir maintenant.

On entend notamment des mises en garde sur le fait que le confinement oblige les femmes à retourner à la maison. Pensez-vous que concevoir cette nostalgie comme étant une "époque plus simple" puisse être dangereux ? Car à l’époque, ce n’était pas vraiment un choix.
Lorsque j’étais petite, ma grand-mère me disait : "Les femmes ont perdu leur pouvoir en décidant d’aller travailler. Car elles avaient déjà le pouvoir de contrôler leur foyer !" Je pense qu’il y a du vrai là-dedans. Mais, comme vous l’avez dit, certaines n’avaient pas le choix : elles devaient rester chez elles. Maintenant, le confinement nous a tous ramenés à cet endroit : nous nous occupons de nos enfants. Cependant, je suis chez moi depuis deux mois maintenant, et c’est peut-être la première fois que nous ne gaspillons pas de nourriture. On prévoit les choses en avance. Avant, j’étais dehors, occupée à travailler.

Réaliser le film vous a-t-il encouragé à faire certaines choses chez vous ? Y compris ce satané repassage ?
Dans un sens, oui. Je préparais du pain islandais avec ma famille, comme elles le font dans le film. C’était notre tradition de Noël : ma mère et ma grand-mère le faisaient frire. C’était quelque chose que nous avions l’habitude de faire et que nous ne faisons plus désormais. Le monde évolue. Tout le monde vit à cent à l’heure et voilà ce que j’ai appris à mon sujet : à ralentir un peu la cadence. On travaille beaucoup, notamment dans cette industrie, alors qu’on pourrait être chez soi à cuisiner ou être créatif, et parfois à se détendre. On ne prend plus le temps de simplement faire les choses.

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(Traduit de l'anglais par Fabien Soulier)

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