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BERLINALE 2020 Encounters

Sandra Wollner • Réalisatrice de The Trouble with Being Born

"Je voulais faire un anti-Pinocchio"

par 

- BERLINALE 2020 : Nous avons discuté avec la réalisatrice autrichienne Sandra Wollner de The Trouble with Being Born, où elle prend enfin le contrepied du mythe de Pinocchio

Sandra Wollner  • Réalisatrice de The Trouble with Being Born

Dans The Trouble with Being Born [+lire aussi :
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interview : Sandra Wollner
fiche film
]
, projeté dans la section Encounters du 70e Festival de Berlin, Sandra Wollner suit un androïde qui a la forme d'une fillette de 10 ans et qui a été nommée Elli par un homme qui la garde dans une maison près de la forêt. Elli est conçue pour être ce que son propriétaire souhaite, jusqu’à ce qu’elle ait soudain besoin de devenir quelqu’un d’autre.

Cineuropa : Les androïdes sont un motif populaire en ce moment, mais quand c’est une enfant, ça fait un autre effet, surtout que certaines des scènes du film peuvent être perçues comme dérangeantes.
Sandra Wollner : C’est vrai. Pour moi, c’est globalement un film sur un androïde en forme d’enfant qui peut être programmé pour faire tout ce que vous voulez, toutes les choses les plus sombres que vous pouvez imaginer, mais qui s’en fiche, car il veut ce que le programme dit qu'il doit vouloir. J’ai trouvé cet aspect assez intéressant. Je sentais que ça me permettait d’aller plus loin dans l’exploration de l'esprit humain, mais ça a été difficile pour moi aussi, surtout pendant la phase de montage. Je peux comprendre, si certaines personnes trouvent ces scènes choquantes, mais dans ce monde de plus en plus "virtualisé", nous sommes déjà capables de projeter nos pensées et désirs sur d’autres gens.

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Même si cet androïde veut, comme vous l'avez dit, ce que le programme dit qu'il doit vouloir, tout le monde n'est pas ravi de ses "prestations". Pourquoi ?
Les gens ne sont pas contents d'Elli – après tout ce temps, je continue de parler d'elle comme si c'était une petite fille – parce que chaque conversation qu'on peut avoir avec elle, avec cet objet, est globalement un monologue. Mais après, elle représente plus l’idée d’un robot qu’une vraie création technique. Il ne s'agit pas de montrer ici les dernières avancées en matière d’intelligence artificielle, ce n’est pas de la science-fiction ou un film sur ce qui pourrait possiblement se passer dans un futur proche. Je voulais juste réfléchir sur un certain aspect de notre réalité actuelle. Et aussi, quand les gens parlent de projeter leur moi intérieur sur un androïde et de le matérialiser dans le monde pour toujours… pour tout vous dire, je trouve cette idée d’éternité assez dérangeante. Ça m’effraie, franchement, cette idée de revivre et revivre encore – qu’est-ce que ça voudrait dire, d'ailleurs ? Je suis pas sûre d’être fan de cette idée.

Votre film n’est pas spécialement charmant non plus – ce n'est pas A.I. Intelligence artificielle de Spielberg –, mais bien qu'Elli n'ait que faire du bien et du mal, il est difficile de ne pas ressentir de l’empathie pour elle à la fin.
À vrai dire, j’ai beaucoup pensé à ce film, surtout que c'est Kubrick qui avait commencé à le développer au départ. En gros, c'est l’histoire de Pinocchio, or moi ce qui m’intéressait, c’était de faire un anti-Pinocchio. Je ne voulais pas qu’elle ait le désir de devenir humaine, ce qui est généralement leur grand objectif. Elli ne veut que ce qui est programmé à l’intérieur d’elle. Si elle avait été programmée pour rêver de devenir humaine, c’est ce qu’elle voudrait. Mais ce serait tout simplement cruel, et clairement, ce n’est pas ce qui se passe ici. J’ai trouvé cela frappant : on a cette androïde et elle s’en fiche qu'un type de cinquante l'amène dans son lit ou de vivre avec une vieille dame en tant que projection de son frère décédé. Je voulais montrer notre monde selon la perspective de quelqu’un qui n’est pas humain, selon la perspective d’un objet qui ne juge pas et qui n’essaie pas de trouver la signification de la vie, qui est, point.

C’est une existence très solitaire qu’elle mène. Était-ce votre idée dès le départ, qu’elle ne soit qu'avec une seule personne à la fois ?
Elli est programmée pour faire tout ce qu’elle fait pendant la première moitié du film, et ensuite il faut la remettre à zéro. Après, elle se fiche du passé, et cette relation se termine comme ça d'un coup – c’était la seule manière de la montrer en train d'agir comme une machine et rien de plus. Le public pourrait se préoccuper de savoir si elle pourrait potentiellement continuer, mais pas l’androïde. Bien sûr, il y a des chevauchements. Il y a toujours des fragments qui restent, ce n’est pas comme si tout était complètement effacé. Mais elle se fiche de ce que ressent cet homme, une fois qu’un autre programme a été installé. Mon film précédent [The Impossible Picture [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
] était un peu différent : j’essayais d’explorer la manière dont on développe un ego. Là, le sujet, c'est plus comment on le détruit.

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(Traduit de l'anglais)

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