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Tomasz Wasilewski • Réalisateur

"Le communisme est l'un des pires fléaux qui aient jamais existé"

par 

- BERLIN 2016 : Tomasz Wasilewski, lauréat du meilleur scénario pour sa première participation à la Berlinale avec United States of Love, nous parle du communisme et de l'importance des femmes

Tomasz Wasilewski  • Réalisateur

Pour sa première participation à la Berlinale, Tomasz Wasilewski est arrivé avec le statut de débutant et est reparti primé pour United States of Love [+lire aussi :
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, l’histoire de trois femmes en pleine crise émotionnelle au lendemain de la période communiste en Pologne, qui a remporté le prix du meilleur scénario.

Cineuropa : Vous n’étiez sûrement qu’un jeune garçon dans les années 90, alors pourquoi avez-vous eu envie de retourner à cette époque avec une histoire aussi forte en émotions ?
Tomasz Wasilewski : Je me suis un jour mis à penser aux possibilités qui s’offraient à mes parents quand ils avaient mon âge – ils avaient à l’époque cinq ans de plus que moi aujourd’hui. Quand j’ai commencé à leur parler de la période où le communisme a pris fin, je me suis rendu compte que les décisions qu’ils pouvaient prendre étaient complètement différentes des miennes, car leur vie elle-même était complètement différente. Cela m’a poussé à revenir à cette période, mais sans parler de politique, car je ne me rappelle pas de la politique de l’époque. Je me souviens seulement des gens auprès desquels j’ai grandi, et ce sont eux que j’ai eu envie de décrire, ainsi que le nombre très restreint de choix qu’ils pouvaient faire.

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Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous placer d’un point de vue si féminin ?
En général, ce sont les femmes qui m’intéressent le plus dans les films que je fais. Les facettes de leur personnalité sont si nombreuses que je pourrais, en tant que réalisateur, me plonger dans leur âme et en explorer les moindres recoins à l’infini. En ce qui concerne ce film en particulier, mon approche provient du fait que je me souviens uniquement de cette époque du point de vue des femmes. Après la chute du communisme, mon père a quitté la Pologne pour aller travailler à New York quelques années, afin de gagner de l’argent et de pouvoir acheter un appartement à Varsovie pour ma famille. Pour lui, c’était le seul moyen d’assurer un meilleur avenir à ma sœur et moi, et il avait raison. Il est donc parti, comme le mari de l’une des protagonistes de mon film qui s’est rendu en Allemagne de l’Ouest. À vrai dire, dans la scène où ils regardent une vidéo de lui, il s’agit en fait d’une vraie cassette VHS que mon père nous avait envoyée. De nombreux hommes partaient à l’époque, et beaucoup de familles étaient dans la même situation que la mienne. Je me suis alors retrouvé seul avec ma mère et ma sœur aînée. Il y avait aussi les amies de ma mère, les amies de ma sœur ; toutes ces femmes constituaient mon seul entourage à la maison, c’est pourquoi je ne me rappelle de cette période de changement qu’à travers leur regard.

Comment Oleg Mutu a-t-il rejoint l’aventure ? Vous aviez envie de travailler avec lui depuis un moment déjà, n’est-ce pas ?
Tout à fait, des années avant de réaliser mon premier film ! Quand je suis allé voir 4 mois, 3 semaines et 2 jours [+lire aussi :
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, je suis sorti du cinéma totalement bouleversé et j’ai su qu’il fallait que je travaille avec lui. Donc, quand je préparais ce film, j’ai mis la main sur son numéro de téléphone, je l’ai appelé et je lui ai dit : "Bonjour, je suis un réalisateur polonais ; pourriez-vous envisager de travailler avec moi ?" Il doit recevoir ce type d’appels au moins une fois par jour, mais il m’a répondu quelque chose du genre : "Ok, envoyez-moi le scénario." Je lui ai donc envoyé le scénario, et il m’a rappelé une semaine plus tard en me disant : "J’aime vraiment l’histoire et la façon dont vous voulez la raconter." Par la suite, nous avons découvert que nous étions intéressés par les mêmes choses au cinéma ; il était comme mon autre moitié en matière de cinéma ! Je n’ai jamais eu autant l’impression de construire l’univers d’un film à l’unisson avec un directeur de la photographie que lorsque nous avons travaillé ensemble. De plus, c’est vraiment quelqu’un de bien, ce qui transparaît à l’écran. Il aime les gens et sait comment les regarder ; c’est très important, car quelqu’un de désagréable ne peut pas faire un bon directeur de la photographie.

Votre film se distingue par ses couleurs, dépourvues de vivacité et de gaité, comme a l’air de l’être le quotidien de vos personnages. S’agit-il d’une sorte de filtre qui représente la nostalgie du passé ?
Nous avons abordé les choses en sachant que nous avions tous les deux grandi dans un contexte communiste, mais dans deux pays différents. Il était d’ailleurs important pour moi de ne pas me contenter d’une perspective polonaise du communisme, mais de raconter la perception du communisme en général, car ce régime n’était pas seulement celui de la Pologne : il était présent dans la moitié de l’Europe. Nous en avons donc parlé, et nous nous sommes rendu compte que nos souvenirs de l’époque étaient dépourvus de couleurs. Nous avons donc décidé de représenter les choses telles que nous nous les rappelions. Cela étant dit, je ne me sens pas du tout nostalgique de cette époque : nous avons grandi dans un pays fermé où nous n’avions pas la moindre opportunité… Le communisme est l’un des pires fléaux qui aient jamais existé.

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(Traduit de l'anglais)

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